Swisscommunity ou le naufrage d’une belle idée
Résumé allemand : Der ASO fiel 2010 eine grossartige Massnahme ein : die Gründung im Internet einer virtuellen Gemeinschaft, um ihr Publikum und ihre sehr enge Wahlbasis (2% bei indirekter Wahl in Frankreich) zu erweitern. Leider ergibt sich aus den gewählten Techniken und aus einer allwesenden ideologischen Zensur, dass nur wenige Delegierte des ASR bzw. Angestellte und Freiwillige der ASO bei SwissCommunity zu treffen sind, was von vornherein jedem richtigen Gedankenaustausch vorbeugt. 85 % der eingeschriebenen Mitglieder loggen sich seit über zwei Monaten nicht mehr ein, sei es auch nur zum blossen Lesen, und die oft trollartigen Diskussionen werden von etwa zwanzig Teilnehmern geführt, was 0,003 % der Auslandschweizer ausmacht. Wir haben es versucht, eine offene Debatte zu initiieren zwischen denen, die das gegenwärtige System verteidigen möchten, und denen,die es auf neue Wege bringen möchten. Hier haben wir das traurige Fazit von Zensurversuchen, Drohungen und Vernebelung.
Résumé français : L’Ose a eu en 2010 une excellente idée : élargir son audience et sa très faible base électorale (2% au suffrage indirect en France) en créant une communauté virtuelle sur internet. Malheureusement entre les choix techniques et une censure idéologique omniprésente, le résultat est qu’on ne retrouve sur Swisscommunity qu’un tout petit nombre de membres du CSE ou d’employés et bénévoles de l’OSE, décourageant par avance tout débat contradictoire. 85% des inscrits ont cessé de se connecter, même en lecture, depuis plus de deux mois, et les discussions, souvent trollesques, se tiennent entre une vingtaine de participants, soit 0,003% des Suisses de l’étranger. Nous avons tenté de lancer un débat contradictoire entre ceux qui voudraient défendre le système actuel et ceux qui voudraient le faire évoluer. Voici le triste résultat, entre tentatives de censure, menaces et refus de transparence.
Swisscommunity ou le naufrage d’une belle idée
L’Organisation des Suisses de l’Etranger souffre d’un manque de lien avec ses membres. Privée par ses statuts du suffrage universel qui lui donnerait la légitimité qu’on pourrait attendre d’une institution suisse, elle ne s’appuie que sur des présidents d’association, associations dont les membres représentent au total un pourcentage infime de la communauté suisse.
Pour ne prendre que l’exemple de la France, il y a environ 190.000 Suisses en France, et il y a parallèlement une centaine d’associations dont à peine plus des 2/3 sont membres de l’UASF et donc de l’OSE. Sur ces 70 associations, une cinquantaine sont réellement actives et annoncent, sans d’ailleurs en justifier, 3 à 4 milliers de membres au total. Faites le calcul : 4 000 membres sur 190.000 Suisses, cela fait à peine plus de 2% des Suisses de France.
L’UASF/OSE: à peine 2% des Suisses de France
En outre, l’UASF et l’OSE souffrent d’un déficit chronique de jeunes actifs urbains et sont plutôt orientées aînés ruraux.
Pour toucher une population plus large, l’OSE a eu en 2010 l’excellente idée de lancer un système de forums en ligne sous le nom de Swisscommunity. Intelligente façon de pallier par le virtuel les manques de bases dans le réel.
Mais voilà, on ne s’improvise pas si facilement jeune, ouvert et démocratique quand on manque d’habitude en la matière.
Passons sur la solution technique à base d’un forum dont une partie est en javascript, et qui ne permet aucune syndication automatique des flux avec un système RSS ou avec un logiciel de courrier. La solution de l’OSE est propriétaire et fermée ce qui en rend l’emploi un peu difficile et empêche un accès simple directement depuis son courrier, contrairement à 90% des forums et blogs. Nous verrons plus bas que ce n’est sans doute pas une erreur mais une volonté.
Passons aussi sur le système de traduction intégrée, basé sur le moteur américain Google, ce qui bien sûr inflige des traductions à faire hurler, et ce qui signifie aussi que l’intégralité des échanges passe par les grandes oreilles américaines. Voilà qui ne manque pas d’étonner au vu des exigences de sécurité et de confidentialité affichées par Swisscommunity.
Après, sur le micromicro-cosme de Swisscommunity, on retrouve les clivages habituels connus en Suisse, notamment les difficultés à se comprendre entre romands et alémaniques, et aussi un certain « racisme culturel » qui conduit à reprocher rapidement à tel ou telle d’avoir trop bien adopté les mœurs de son pays d’accueil. Les Suisses de France qui ouvrent la bouche se font traiter de « français ». A défaut de se charrier entre cantons, c’est entre pays d’accueil qu’on s’observe.
Numériquement c’est assez décevant. Si Swisscommunity affiche fièrement 32 000 inscrits (Septembre 2014) au bout de 4 ans d’existence, soit un peu plus de 4% de la population totale des Suisses de l’étranger, on constate que 28 000 soit 85% des inscrits ne se sont pas connectés depuis au moins 2 mois. On constate aussi que 95% des discussions sont tenues entre une dizaine de « permanents » qui sont des membres du CSE, des employés payés ou des bénévoles de l’OSE et une autre dizaine de contributeurs réellement indépendants.
Swisscommunity en chiffres,
4% des Suisses de l’Etranger inscrits, 5 pour mille qui se connectent, 20 individus qui discutent.
On y voit essentiellement des Suisses qui viennent une fois chercher un renseignement pratique (finance, santé, job, logement) et ne reviennent pas, et par ailleurs des discussions souvent orageuses ou trollesques et frisant régulièrement le célèbre point Godwin.
On y retrouve un côté sympathique de la Suisse qui est la recherche du consensus et la désapprobation des propos excessifs ou négatifs, mais tellement poussée à l’extrême que tout ce qui pourrait de loin ou de près ressembler à la critique du système privé du CSE autoproclamé « parlement de la cinquième Suisse » est fermement découragé voire expulsé.
SwissCommunity ou la liberté d’expression sous surveillance ?
Il suffit de prononcer quelques mots sur le sujet pour provoquer une réaction graduée commençant par des remontrances publiques de la part de membres du CSE et de modérateurs nommés par l’OSE et se terminant parfois par des e-mails privés qui vous font comprendre que vous êtres indésirable et que si vous insistez, on pourrait fermer votre compte d’autorité. C’est la célèbre méthode KzB.
Et, cerise sur le gâteau, les contributions qui déplaisent sont brusquement censurées, sans que l’on sache bien par qui ni pourquoi. La démocratie, visiblement, cela ne s’apprend pas quand, étant petit, on est tombé à côté du chaudron.
Qui en est responsable ? Les modérateurs ? Les administrateurs ? Le CSE ? Les fonctionnels de l’OSE ? Les dirigeants de l’OSE ? Difficile de le savoir car l’obscurité règne, et il est impossible de savoir qui fait quoi, la plupart n’ayant pas pour habitude d’assumer leurs actes de censure, et les censures étant faites de surcroît anonymement.
En revanche, le terrain de jeu offert par Swisscommunity a été repéré par divers propagandistes de l’UDC, parti représenté au sein du Comité, l’instance dirigeante de l’OSE. Ceux-ci viennent négligemment ou lourdement faire la propagande de leur parti sur une plateforme que l’on espérait de prime abord apolitique ou du moins pluraliste. Dans la même veine, on trouve aussi quelques révisionnistes affichés (qui aimeraient bien qu’on ne les confonde pas avec des négationnistes – dont acte -), se réclamant également parfois du mouvement libertarien, et qui affirment leurs thèses et leur mépris de l’état social ou socialiste, ainsi que leur nationalisme avec une violence verbale étonnante. Dommage d’ailleurs, car une fois dépassé leur carapace de piquants, on trouve parfois dans leurs contributions des choses raisonnées et intéressantes, loin de l’opinion majoritaire en forme de consensus bêlant. Ce qui n’excuse ni ne justifie pour autant les thèses violentes et appelant à l’exclusion.
La censure d’un côté, la libre expression de l’extrême droite de l’autre
Nous aurions aimé pouvoir vous présenter une vue contradictoire des choses, car si nous sommes quelque peu dubitatifs sur le système auquel s’accroche le CSE d’une part et l’OSE d’autre part, les arguments de ceux qui le défendent auraient été – par définition – intéressants à étudier d’un point de vue journalistique.
Seulement voilà, la censure n’admet pas la contradiction et Swisscommunity n’admet pas que l’on pense autrement que ses animateurs zélés.
Nous avions d’abord republié une partie qui nous semblait intéressante des discussions, notamment de ceux – tous plus ou moins membres du système – qui le défendent bec et ongles. Dans les 24 heures, cela nous a valu une lettre comminatoire d’une des responsables exigeant le retrait de ces propos, à peine de poursuites et de sanctions. Basé sur quoi ? Sur le droit d’auteur !!! Les personnes qui donnent leur avis sur un forum pourraient revendiquer leur droit d’auteur. Ce serait amusant si ce n’était pas si pitoyable.
Alors nous avons retiré d’ici les contributions en question et reçu … une nouvelle mise en demeure de retirer la signature de la personne qui avait exigé ce retrait. Non seulement on censure, mais encore on n’assume pas d’avoir demandé de censurer. Cette demande, sans base juridique, a été ignorée après consultation de nos spécialistes.
Mais alors qui sont les gens qui soutiennent le système ?
Alors, toujours à la recherche de gens pouvant nous expliquer pourquoi ils étaient favorables à la parodie de démocratie que représente l’OSE, nous avons posté un appel à contribution précisant que nous souhaitions que des membres favorables au système nous expliquent leur position, en demandant que ceux qui le critiquaient veuillent bien s’abstenir sur cette discussion particulière. Peine perdue, personne d’indépendant ne s’est présenté pour défendre le système, mais la Propagandastaffel est venue en nombre troller le fil pour dissuader toute velléité de transparence.
Et enfin, pour prendre en compte les menaces de violation de droit d’auteur, nous avons demandé à chaque contributeur de bien vouloir nous autoriser à reprendre ses contributions sur Swisscommunity, afin de pouvoir vous rendre compte objectivement de ce qui se dit, dans des articles comme celui-ci, sans le filtre de notre propre reformulation. Bizarrement, seuls ceux qui sont des détracteurs du système OSE ont communiqué leur autorisation, ceux qui le soutiennent, membres du CSE et modérateurs inclus, ont préféré en rester à l’interdiction pure et simple.
Les pour qui n’assument pas. Les contre qui assument
Etonnant donc, car on est donc conduit à penser que les afficionados du système, déjà peu nombreux, n’assument pas les positions qu’ils prennent sur Swisscommunity et refusent d’en débattre sur des médias plus libres, médias supportant la contradiction. Nous aurions aimé savoir de quoi ils ont peur en réalité, mais … impossible de leur tirer le moindre mot. Peut-être de perdre leur (pseudo) mandat de parlementaire (non élu) de la cinquième Suisse ?
En résumé
Nous ne serons donc pas en mesure de vous présenter les arguments de ceux qui pensent qu’il faut maintenir le système peu démocratique actuel, car ces arguments sont confidentiels et leur reprise est streng verboten.
Nous restons sur notre faim en ce qui concerne nos questions de départ
– comment un système privé et privatisé en 1989 en sortant de la NSH peut-il représenter des citoyens sans leur donner le droit d’élection ?
– qui fait quoi entre OSE et faîtières nationales, déclarées obligatoires dans tel pays mais allègrement contournées dans tel autre, quelles sont les relations de responsabilité, de pouvoir, de finance ?
– qui décide de quoi là dedans, et qui valide par son silence des élections régulièrement entachées d’irrégularités pour ne pas dire de fraudes ?
– le CSE est-il un organe politique ou un organe apolitique, alors qu’il s’appuie par exemple ouvertement sur l’UDC en août 2014 pour faire valoir un intérêt particulier (comptes chez Postfinance), après avoir, il y a quelques années, fait ouvertement barrage à l’entrée de l’UDC ?
– quelle est la portée et la légitimité des consignes de vote que donne l’OSE ?
– à quoi servirait le CSE si les Suisses de l’Etranger élisaient directement leurs propres conseillers nationaux et aux états ?
– combien coûte réellement tout cela et qui paie ?
L’avenir de Swisscommunity… et de l’OSE
Les modérateurs le déplorent déjà depuis un certain temps, l’audience de Swisscommunity, déjà faible au départ, s’est écroulée d’un facteur 2. Certes, il y a quelques flambées lors des élections quand les candidats viennent chercher des voix, ou quand un opposant vient troller tel sujet, mais dans l’intervalle, c’est l’encéphalogramme plat, aggravé par le fait qu’un nombre important de membres du CSE, y compris des présidents nationaux, s’abstient soigneusement de venir s’y montrer.
C’est bien dommage, car même si elle a souvent combattu pendant des années les avancées démocratiques dont elle prétend aujourd’hui s’honorer (nationalité des enfants de mère suisse, exercice du droit de vote des Suisses depuis l’étranger, élection démocratique de son conseil, … ), l’OSE n’en a pas moins sur d’autres points fait preuve d’une bonne volonté et d’une utilité certaine, tant qu’elle est restée au niveau social et non politique. Et en se terrant dans ces positions frileuses et repliées, certes elle pense éviter tout risque de déplaire au DFAE mais elle se coupe de plus en plus de sa base, comme le montre le nombre décroissant d’associations qui renouvellent leur adhésion.
Et il n’y a pas qu’ici qu’on le dit, voyez plutôt http://www.politnetz.ch/artikel/17067-die-auslandschweizer-organisation-aso-will-an-die-e-mail-accounts-aller
Alors combien de temps la mayonnaise Swisscommunity mettra-t-elle avant de prendre ou de retomber faute d’intérêt ? Nul ne peut le dire, mais pour le moment, beaucoup de bruit pour pas grand-chose.
PS : Aux adeptes du droit de réponse : Ici, contrairement à ce qui se pratique ailleurs, nous n’interdisons pas les opinions qui ne sont pas les nôtres. Simplement, nous ne sommes pas responsables des refus de Swisscommunity de nous laisser publier les points de vue développés sur son site, et des refus de nous laisser publier la signature des courriers qui nous sont adressés. Nous sommes un site de droit français, et le droit de réponse, ici, il est signé et donc non anonyme.