La Suisse était …. presque prête

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Exercice à grande échelle en 2014, plan de pandémie, rapport d’experts pour adapter le Service sanitaire coordonné (SSC): les problèmes de la crise avaient été envisagés. Mais la réalité est toujours différente

Sur le papier, la Suisse devait être prête à gérer la crise du coronavirus. En 2014, le Réseau national de sécurité a organisé un grand exercice qui comporte deux volets, dont l’un était précisément le scénario d’une pandémie: «En deux mois, un virus inconnu se développe en Asie et atteint l’Europe»!

Cet exercice a permis d’affiner le plan suisse de pandémie d’influenza. Cet outil de travail, dont la dernière version date de 2018, est une sorte de guide Betty Bossy destiné aux autorités fédérales et cantonales. Sur le plan des compétences, il a renforcé le rôle de la Confédération, tandis que les cantons restent responsables de l’exécution.

«Aucune obligation de constituer des stocks»

Mais certains chapitres du plan résonnent étrangement à l’aune de l’expérience actuellement vécue sur le front de la pandémie. «En Suisse, la capacité de production des désinfectants est suffisante et peut être augmentée. Il n’existe donc aucune obligation de constituer des stocks», peut-on y lire dans la partie consacrée aux mesures de lutte. Or, aujourd’hui, la pénurie de désinfectants est la principale crainte des hôpitaux! Abonnez-vous à cette newsletter J’accepte de recevoir les offres promotionnelles et rabais spéciaux.

Un peu plus loin, ce document aborde l’effet protecteur des masques d’hygiène non seulement pour les malades, mais aussi pour les bien portants. «Un masque protège en partie les personnes en bonne santé d’une contamination. Le risque général d’infection s’en trouve réduit», indique-t-il. C’est presque le contraire de ce que martèle depuis six semaines Daniel Koch, le chef de la division des maladies transmissibles à l’Office fédéral de la santé publique (OFSP).

Plateforme de données

Au cœur de la crise, il y a aussi le Service sanitaire coordonné (SSC), que dirige le médecin en chef de l’armée Andreas Stettbacher. Une petite structure de cinq personnes, mais dont le rôle est capital en cas de crise. Il doit coordonner l’ensemble des moyens sanitaires, notamment grâce à une plateforme de données qui actualise chaque jour le nombre de lits de soins intensifs, le matériel médical à disposition et le nombre de nouveaux cas. Or il a fallu près de trois semaines pour que les cantons assurent une qualité de données permettant au SSC d’avoir enfin une vision d’ensemble concernant la situation en Suisse.

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En 2018, Thomas Zeltner, l’ancien chef de l’OFSP, a remis un rapport concernant l’avenir du SSC. Il y souligne déjà le problème majeur qu’a révélé la crise: la forte dépendance de la Suisse par rapport à l’étranger concernant l’approvisionnement en biens médicaux. En quittant l’ère de la guerre froide, l’on est passé en Suisse d’une politique de stock à une logique d’achats en flux tendu. C’est celle-ci qu’il faudra remettre en question.